Figure phare du tatouage aux États-Unis, Bert Grimm est resté en haut de l’affiche pendant 7 décennies. Génie acquis plutôt qu’inné, ce bourreau de travail s’exercera sans relâche jusqu’à son dernier souffle afin d’exceller dans son art et son entreprise. Une carrière exceptionnelle qui fait rêver encore aujourd’hui.
Le tatouage : une vocation précoce pour Grimm
Bert Grimm nait à l’aube du 20ème siècle, en février 1900 dans la capitale de l’Illinois, Springfield. Attiré très jeune par l’univers du tattoo, il est à peine âgé d’une dizaine d’années quand il commence à errer dans les salons de tatouage de la ville.
À seulement 15 ans, le jeune homme décide de quitter le nid familial pour partir à la conquête du monde. Il découvre la vie de nomade en intégrant les Wild West Shows, d’impressionnants spectacles itinérants au succès populaire phénoménal aux Etats-Unis et en Europe, des années 1870 au début des 1930’s. Voyageant de ville en ville, Grimm va s’initier à l’art du tatouage via des rencontres fortuites et éphémères avec de nombreux artistes de son époque. Percy Waters, William Grimshaw, Frank Kelly, Jack Tryon, Moses Smith, Hugh Bowen figurent parmi les tatoueurs qui croisent sa route et lui permettent de diversifier et d’enrichir son apprentissage.
De passionné à professionnel
Si à 20 ans il vit déjà de son art, Grimm reconnait néanmoins son manque de précision et prend la décision d’entreprendre une véritable formation. En 1923, bien décidé à exceller dans le métier, il abandonne la vie de bohème. Le destin met sur son chemin Sailor George Fosdick, tatoueur chevronné et particulièrement célèbre dans la ville de Portland. À ses côtés, il forge son style pendant plusieurs mois avant de débarquer à Los Angeles pour aiguiser son coup d’aiguille auprès de Sailor Charlie Barrs, autrement dit, “the Granddaddy of all good tattooing” (le grand-père de tous les bons tatouages), rien que ça.
Fosdick et Barrs lui enseignent les bases du style américain traditionnel qu’il s’appropriera et ne cessera de parfaire au cours de ses 70 ans de carrière. En effet, s’il perpétue le style Old School en suivant les codes classiques : palette de couleurs limitée (jaune, rouge, vert, noir) et motifs mythiques tels que la rose, la tête de tigre, le cœur, le crâne, la panthère, le poignard, les cartoons, etc. Il en propose une version plus épurée, en jouant sur les ombres et les nuances de noir. Il créé un style bien à lui, identifiable au premier coup d’œil et surtout, intemporel, à tel point que l’on retrouve, aujourd’hui encore, ses motifs de tattoo flash imprimés sur des vêtements.
Tattooin’ is a fascinatin’ business
Comprenez « le tatouage est un business fascinant ». Voilà ce que Grimm se plaisait à dire, et pour cause. En 1928, il part s’installer à Saint-Louis dans le Missouri. Une destination judicieusement choisie : entre la caserne militaire de l’US Army située sur les berges du Mississippi et les débarquements quotidiens de marins sur les quais, sa clientèle était toute trouvée.
Il ouvre son propre salon en un temps record et travaille non-stop. Grâce à ces centaines de candidats prêts à se faire encrer, il fignole son art jour après jour et pérennise son activité. Bert Grimm est un travailleur acharné : il tatoue 7 jours sur 7 et dans les espaces attenants à son salon, il créé et gère en parallèle une salle de jeux et un studio photo. Véritable homme d’affaires, son investissement et sa détermination payent puisque sa petite entreprise ne connait pas la crise alors que les USA viennent tout juste d’être touchés de plein fouet par le krach boursier de 1929 et la Grande Dépression qui s’en suit.
Une longue et prolixe carrière
Après 26 ans à couvrir les corps de marins et militaires à Saint-Louis, Grimm est incontestablement reconnu comme l’un des plus grands tatoueurs du pays. Il poursuivra sa carrière pendant 30 années encore, dans les salons les plus prestigieux des USA et du monde avec un passage particulièrement remarqué au Nu-Pike. Ce parc d’attraction mythique de Long Beach en Californie était the place to be dans les 50’s-60’s pour les marins qui voulaient se faire marquer à l’encre indélébile avant de repartir en mer. Au milieu des dizaines de boutiques du Nu-Pike, le salon de Grimm détenait le titre du plus ancien salon de tatouage exploité en continu du pays. De quoi renforcer sa renommée et d’allonger la file d’attente devant sa porte ! Après une escale à San Diego et Portland, il ouvre sa dernière boutique à Gearhart dans l’Oregon… dans sa propre maison ! Passionné et perfectionniste, il est incapable de prendre sa retraite et ne cessera de tatouer jusqu’à sa mort, en 1985.
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